Depuis des millénaires, l’ambre a toujours fasciné les hommes par son toucher agréable, sa légèreté, ses couleurs, ses formes, l’histoire de saformation et l'observation de ses inclusions nous entraînent vers les plus beaux rêves... L'ambre nous paraît à la fois familier et formation et étrange mais reste pour beaucoup d’entre nous une gemme fort attrayante. Souvent travaillé de façon simple, son aspect de miel et sa transparence lui donnent une dimension de gemme.
De nombreux artisans et artistes ont par sa présence créé de ravissants bijoux . Pour les scientifiques, l’ambre est un conservatoire du passé1. Ses noms dans les différentes langues, attestent tantôt de ses propriétés réelles ou supposées, tantôt témoignent du mystère qui a longtemps entouré son origine. En français, le mot « Ambre » vient par l’intermédiaire du latin médiéval, de l’arabe « Anbar » désignant le cachalot. Ceci montre la confusion des Anciens faite entre l’ambre gris (concrétion parfumée du cachalot) et l’ambre jaune, que l’on croyait également né de la mer ... L’ambre s’électrise facilement par frottement, le nom grec « clektron » électron qui le désignait alors, est à l’origine du mot électricité. Dans les langues germaniques « Bernstein » (la pierre qui brûle) met en évidence sa propriété à se consumer. En lithuanien « Gintaras » signifie amulette et par extension protecteur. Ce mot dérivé du prussien « gentar » est passé par la plupart des langues salves actuelles (Jantar en russe, Gyantar en hongrois...).
Bref historique
Cette attirance de l’homme pour l’ambre remonte en Europe déjà dès le Paléolithique où des morceaux d’ambres provenant de la Baltique ont été retrouvés dans des Grottes en Autriche et en Roumanie. D’autres morceaux ont été conservés par les civilisations mésopotamienne et égyptienne (+/- 1500 Av JC). Les écrits de Pline supposaient déjà à l’époque une origine organique à l’ambre. Des statuettes d’ambre, des bagues, des fétiches de diverses civilisations ont été découverts à travers le monde. Utilisé depuis le IIIe millénaire dans un but à la fois décoratif et curatif, l’ambre jaune a été l’objet d’un commerce important dans l’Antiquité et a inspiré diverses légendes. (Plus de deux mille statuettes en ambre ont été découvertes pour la ville de Veksunna). De nombreux objets de culte ont durant la Renaissance été travaillés dans de l’ambre. Mais la plus célèbre réalisation en ambre était une chambre de 55 m2 réalisée pour Elisabeth Petrovna vers le milieu du 18 eme siècle. Cette chambre a disparu mystérieusement durant son transport pendant la seconde guerre mondiale...
Comment l’ambre a-t-il été produit ?
L’ambre résulte de la production puis de transformation d’une résine d’arbres (ou de pins) il y a des millions d’années. Les arbres produisant ces résines sont éteints. Les ambres photographiés proviennent du Pinus Succinifera2 de la Baltique. Pour expliquer la production de grands morceaux d’ambre, certains scientifiques supposent que la résine fut produite par l’arbre comme mécanisme de défense contre les insectes ou champignons.
Comment l’ambre a-t-il été formé ?
Peu de temps après que la résine ait été produite par l’arbre des réactions chimiques s’enclenchèrent. La résine commença à se durcir et les molécules changèrent leur structure par une réaction appelée polymérisation.
Cette réaction consiste à ce que de petites molécules se groupent pour former de longues chaînes moléculaires. Dès que cette réaction est terminée la résine résultante est appelée « copal ». Après la polymérisation, certaines huiles (appelées Turpène) s’évaporent. Cette réaction peut s’étaler sur plusieurs millions d’années afin que le copal se transforme en ambre. Cette réaction chimique se passe dans un environnement pauvre en oxygène (dans des marais ou en mer) sinon le copal s’oxyderait au contact de l’air et sa surface extérieure s’abîmerait fortement.
Où trouve-t-on de l’ambre ?
L’ambre est trouvé dans de nombreuses régions (Lithuanie, Mexique, St Domingue, Suisse, Mer Baltique, Myanmar, Sicile...). Régions dans lesquelles des arbres produisaient de la résine, il y a près de 40 millions d’années.
Comment l’ambre est-il recherché ?
Après les fortes tempêtes hivernales qui « arrachent » aux sédiments, les plages de la Baltique3sont parcourues par des chercheurs d’ambre qui vêtus de cirés de pêcheurs et de grosses bottes, un filet à crevettes en main parcourent le long des côtes.
Par mer calme, des scaphandriers, bateaux armés de filets et perches arpentent le long de la côte. Pour les gisements sur terre, il existe des mines de toutes dimensions. Dans certaines régions, les autorités ont mis en place un système de licences pour les chercheurs amateurs. Un autre procédé de prospection de l’ambre se fait par injection d’eau sous pression pour faire remonter les morceaux.
De quoi l’ambre est-il fait ?
La composition chimique de l’ambre de la Baltique n’a pas encore été établie avec certitude4. Toutefois, l’on peut dire de façon générale que la composition chimique des ambres n’est pas toujours la même. Un même morceau peut avoir en différents points une composition fort variée.
De façon générale, on peut dire que l’ambre est un hydrocarbure et que sa formule chimique varie de C10H16O - 13C40H64O14 - 12C12H20O. Cette grande variété de composition chimique est due à l’origine « organique » de cette gemme. L’ambre est subdivisé en deux groupes suivant leur teneur en acide succinique.
Les rétinites sont des variétés d’ambre comportant une faible teneur en d’acide succinique, et le groupe des succinites (riche en acide succinique). L’ambre de la Baltique appartient aux succinites.
Pourquoi existe-t-il des ambres de couleur différentes ?
Les couleurs de l’ambre sont extrêmement variées allant de blanchâtre au noir en passant par les jaunes, les ocres, les oranges, les rouges, les verts, les bruns... L’origine de ses couleurs peut être de différentes origine : l’espèce d’arbre produisant la résine, les contacts de cette résine avec les autres minéraux ou organismes, les changements géologiques subit (réchauffement, pression)... Certaines couleurs sont le résultat de l’altération de leur couleur initiale à la lumière (tendance à foncer avec le temps), réaction à l’air (oxydation). Certains ambres (de St Domingue) ont la propriété de montrer une faible fluorescence sous un éclairage ultraviolet. D'autres couleurs sont obtenues par traitement.
Quels sont les différents noms donnés à l’ambre ?
En fonction de sa provenance et de sa formation les variétés d’ambre portent des noms différents (Cédarite, Burmite, Simetite, Roumanite, Almashite, Muntenite...) Les anciens Tibétiens surnommaient l’ambre pö-she (« cristal parfumé ») en raison de sa senteur semblable à celle de la résine.
Quelle est la grandeur des morceaux d’ambres trouvés ?
La grandeur des morceaux d’ambre dépend de deux facteurs : leur grandeur au moment de la production et leur conservation au cours du temps.
La grandeur des morceaux d’ambre produits dépendait de la variété produisant la résine, la localisation de la résine accumulée, la viscosité de la résine, de la température ambiante (qui a tendance à faire varier la sécrétion de la quantité de résine), la pression de la sève (variant suivant la saison). Par les différentes actions de l’érosion (la glace, les pierres, le sable, les morceaux d'ambre ont tendance à se casser au cours du temps. La plupart des morceaux d’ambre que l’on trouve ne pèsent que quelques grammes. Le plus grand morceau d’ambre provenant de la mer fut trouvé en 1862 et pesait plus de 9.5 kg. Cette pièce est exposée au Muséum de Berlin. A Bornéo fut extrait le plus grand morceau au monde. Cet échantillon pesait près de 68 kg. Durant son extraction cette pièce spectaculaire cassa en 4 morceaux.
Que peut-on voir dans l’ambre ?
Lors d’une observation approfondie, l’ambre se transforme en une fenêtre figée sur le passé. Cet aspect fort intéressant réside dans l’observation des inclusions de cette gemme. Dans certains morceaux d’ambre on pourra voir de la faune et/ou de la flore. Dans l’ambre de la Baltique, on rencontre plus fréquemment des insectes similaires à de petites mouches, des petites aiguilles de pins, de petits fragments de bois... Il est très rare de trouver de grands insectes. Car « costauds », ces insectes avaient la force de se tirer hors de la résine. Une inclusion d’un animal ou un végétal observée de l’extérieur semble complet et intact. Une coupe transversale révèle que seul le tégument (carapace chitineuse) et quelques restes de tissus déssèchés sont conservés (l’inclusion paraît vide de l’intérieur). Afin que les inclusions soient préservées, il faut que la résine les englobe relativement rapidement et totalement. En effet, si une partie d’une inclusion organique n’a pas été recouverte, cette inclusion se décomposera au contact de l’air. Des objets et animaux inhabituels ont été trouvés dans quelques rares spécimen (un petit lézard, une dent, des morceaux de grenouille)
Quel est l’âge de l’ambre ?
Il n’est pas possible de dater l’ambre par la méthode des radio-isotopes. L’ambre ne comporte pas d’élément dont la demi-vie de l’isotope correspond à sa formation. Son âge peut être estimé approximativement par datation de terrains qui accompagne5 l’ambre durant son transport. L’ambre balte est estimé à 40 millions d’années
Les imitations
Depuis plusieurs centaines d’années des inclusions contemporaines ont été introduites dans des morceaux d’ambre en les chauffant ou les compressant. L’ambre est imité par de nombreuses résines, plastiques et le verre. Début 1900, la nouvelle Zélande exporta par tonnes une résine contemporaine fort similaire à l’ambre provenant du Kaori Gum.
Légendes et croyances
L’ambre a été utilisé dans des « remèdes » les plus divers et plus particulièrement les affections de la gorge. En suisse, l’on faisait porter aux enfants de colliers en ambre afin de soulager les douleurs de la dentition. Cette tradition est probablement originaire de Lithuanie, Lettonie ou de Pologne.
Médecine
L’ambre est encore parfois utilisé en homéopathie. En médecine populaire, on en a extrait l’acide succinique.
Détection
L’ambre flotte dans une solution saturée en sel alors que la plupart des plastiques coulent. L’eau de la mer Baltique étant pauvre en sel, l’ambre reste au fond et remonte que lors de mouvements marins importants. Certains morceaux d’ambres contiennent suffisamment de bulles gazeuses pour que leur densité soit inférieure à la densité de l’eau.
Lexique
Ambre gris : nom donné a des composés présents dans les intestins des cachalots.
Burmite : variété d’ambre originaire de Birmanie (Eocène)
Copal : Etat « intermédiaire » entre une résine et l’ambre.
Kauri gum : Résine contemporaine similaire à l’ambre
Roumanite : ambre de provenance de Roumanie et Golfe Persique (âge : Paléocène supérieur), de couleur jaune à brun.
Simétite : ambre d’originaire de Sicile (Miocène) de couleur vert jaune et rouge.
Bibliographie
Bubshait A, (1993), Notes from the Gem and Pearl Testing Laboratory, The Journal of Gemmology, Vol 23 N°7
Fraquet Helen, (1987), Amber, Butterworths
Genot L., (1998), LE MINI-GUIDE DE L'AMBRE, collection Genot
Hurwit K, Kammerling R., (1993), Gem Trade Lab Notes, Gems and Gemology Vol. XXXIX
Krzeminska E., Krzeminski W., Haenni J-P, Dufour C., (1992), Les Fantomes de l’Ambre, insectes dans l’ambre de la baltique, Musée d’histoire naturelle de Nuchâtel.
Tay Thye Sun, (1995), An Amber Imitation, The Australian Gemmologist, Vol.19 N°4
1 La faune et la flore de ses inclusions sont étudiées par les paléobotanistes ou les paléozoologistes, la composition des spécimens par les géochimistes et ses conditions de dépôts par les géologues.
2 Nom collectif donné par Conwentz en 1890 pour les 5 espèces qu’il pensait être des pins (de la Baltique). Il semblerait que l’ambre provienne de cèdres et d’araucarias.
3 On suppose que l’ambre de la Baltique (qui était originaire de la Péninsule de Samland) a été transporté par des rivières. On dit alors que cet ambre provient de dépôt seccondaire.
4 Sa dissolution totale n’a pu être réalisée à l’heure actuelle
5 L’ambre est souvent « détaché » de son lieu de dépot